BIENVENUE À COTTON'S WARWICK de Michaël Mention

Australie.
A Cotton’s Warwick, il y a une terre rouge et brûlante, un sol stérile d’avoir été trop sucé, des mines essorées, abandonnées, du bétail décharné. A Cotton’s Warwick, au milieu de rien, dans l’Outback, on boit. De la bière, beaucoup de bière. On chasse le kangourou. On ne baise pas, il n’y a plus de femme. Ah si, il reste Karen. Mais on ne baise pas Karen, le Ranger Quinn y veille, alors on s’enfile Biba à la fraîche, en soirée. A Cotton’s Warwick, il reste l’abattoir, les trafics qui paient la bière, les haines remâchées, les frustrations. A Cotton’s Warwick, ils sont dix-sept à (sur)vivre la fin de leur bled qui s’éteint inexorablement.
Le même jour, plus tard. Et plus chaud aussi. Un après-midi comme un autre, entre bière et ennui, sous ce soleil éclatant. Eruption or, sans nuance ni pitié, focalisée sur les rares eucalyptus du coin. Oui, il en reste encore quelques-uns à travers le Red Grass. Avant, cette étendue était un gigantesque champ qui emplissait l’horizon. Il n’en reste aujourd’hui qu’un semblant de prairie rousse, la dernière à résister à la canicule. La vie, si naïve.
Et ces morts telle une malédiction…
Un mort, puis un deuxième. Inexplicables. Et la tension commence là. Démarre alors un vrai délire de l’auteur. Un « j’écris tout ce que je veux de plus fou, de plus décalé, je ne retiens rien ». Chaleur extrême, situations extrêmes, personnages extrêmes. Rien n’est sous joué. Ça pue, ça vomit, ça haït, ça boit encore et encore. Et cette folie des hommes qui se perdent. Qui perdent le peu d’humanité qui leur restait. La folie, la peur, le sang. Ça suinte. L’homme est une bête. Une bête traquée. Une bête parmi les bêtes.
Mickaël Mention écrit toujours à côté. Il s’en fout d’être à côté. Tu grimaces ou tu adores. Faire tenir un match de foot sur la longueur d’un roman avec Jeudi noir, c’était ambitieux. A Cotton’s Warwick, il lâche sa plume dans un complet déjantage, la mise en forme même du texte colle à l’éclatement de ce village, de ces restes de vies. Un roman noir surréaliste. Un tableau de Dali. L’envie de relire Une charogne de Baudelaire.
Et pas d’étiquette à y coller.
Je suis définitivement ferrée.
Ombres Noires (2016)
252 pages
L’AUTEUR
Romancier et scénariste, Michaël Mention est passionné de rock et de cinéma. Il publie son premier roman en 2008 et devient une voix montante du polar avec notamment La voix secrète, Sale temps pour le pays (Grand Prix du roman noir français au festival du film policier de Beaune 2013) et Adieu demain. Après Jeudi noir, Le carnaval des hyènes, Bienvenue à Cotton’s Warwick est son troisième roman aux éditions Ombres noires.