ET TOUJOURS LES FORÊTS de Sandrine Collette
Les hommes étaient intrinsèquement des meurtriers. Ils puaient la mort. Aussi stupides que les cellules cancéreuses détruisant les corps qui les abritent, jusqu’à claquer avec eux. Tuer et être tué.
Insensés.
Je ne veux presque rien raconter de ce livre. C'est embêtant de confier un avis sans n'en rien dévoiler. Mais voilà, ce qui m'a le plus brimbalé dans ce texte est justement de n'en avoir rien su, de n'avoir pas lu la quatrième de couverture, de n'avoir pas lu les avis publiés ici et là, et donc de ne rien savoir de son contenu. Je suis allée vers ce livre pour tous les oh ! les ouah ! de personnes dont les appétences littéraires sont proches des miennes. Parce que j'ai lu que ce roman est noir, âpre et beau. Et il est tout ça.
La narration de départ m'a prise dans sa linéarité, dans l'histoire de cette femme engrossée, retenue dans une maison au cœur des Forêts, avec la naissance de cet enfant, Corentin, non désiré, non regardé, cet enfant abandonné aux Forêts. Qui va grandir. Qui va se construire. Jusqu'à cette fracture insensée qui fait basculer le livre dans un tout autre univers, une fracture inattendue, que je n'ai pas vu arriver, ne sachant rien de l'histoire. Et c'est ce que j'ai aimé, ça m'a comme assommé, j'étais abrutie. La linéarité rompue violemment, pour se poursuivre sur un autre plan. Génialement amené.
Après, ce fut âpre et noir.
Et long. Et redondant. Il manquait de lumière, on a bien saisi qu'il manquait de lumière, et c'est vrai qu'il y avait toute cette poussière, il en tombait de chaque page (et quand je vois que deux autres titres de l'auteure sont de cendres et de poussières, je me dis que ça peut finir par brûler les yeux). Puis, il y a eu ces incohérences, Corentin a dû se nourrir, il a dû se soigner, et ça n'a pas été un problème malgré la fracture, ça questionne forcément le lecteur sur le comment de la chose. Une amie m'a dit de passer au-dessus, d'accepter les libertés prises par l'auteure, sans comprendre, que la suite valait la peine de ne pas tout s'expliquer, mais ça m'a gênée pourtant. Et puis, j'ai tellement repensé à Cormac Mc Carthy qui lui aussi a écrit sur cette fracture. Si bien. Si parfaitement. (J'ai d'ailleurs cru lire un clin d'œil à son œuvre de la part de Sandrine Collette, ou bien je l'ai seulement voulu).
Oui, j'ai pris du plaisir à cette lecture. Le style de l'auteure permet de s'immerger dans les Forêts désossées et déshumanisées, et dans le noir absolu, chercher la lumière. Toujours. Entre poésie et désespoir. Mais je l'avais déjà lu.
JC Lattès (2020)
334 pages
L'AUTEUR
Des nœuds d'acier publié en 2013, son premier roman rencontre un vif succès critique et public avec 20 000 exemplaires vendus. Il obtient le Grand Prix de littérature policière ainsi que le Prix littéraire des lycéens et apprentis de Bourgogne. En 2014, elle publie son second roman Un vent de cendres (chez Denoël) qui revisite le conte La Belle et la Bête. Devenue l'un des grands noms du thriller français, une fois encore, elle montre son savoir-faire imparable dans Six fourmis blanches (2015). Il reste la poussière (2016) obtient le Prix Landerneau du polar. En 2017 paraît Les larmes noires sur la terre.