REPOSE-TOI SUR MOI de Serge Joncour
Aurore a créé sa propre marque de vêtements, elle est une styliste reconnue. Mariée, deux enfants, une nounou, un immense appartement, une réussite de vie parisienne telle qu’on peut l’imaginer de province.
Ludovic est agent de recouvrement de dettes, il a quitté sa ferme et la vallée du Célé après la mort de sa femme. C’était il y a trois ans.
Tout oppose ces deux personnages, il y a même une cour qui s’est mise entre leurs appartements. Dans cette cour où viennent de s’installer des corbeaux. Et les corbeaux, elle n’aime pas ça Aurore, rien que d’y penser elle en a froid dans le dos. Ludovic sait lui, comment s’en débarrasser.
Toi qui vas suivre l’auteur dans l’intimité de ses personnages, dans leur quotidien, si tu les observes, si tu les écoutes, si tu arrives à les ressentir, malgré tout ce qui les sépare, tu leur trouveras un point commun. Leur solitude. Car on peut être seul parmi l’agitation de bureaux, on peut être seul assis à table, en famille, on peut être seul dans une chambre trop silencieuse, on peut être seul pour ne pas encombrer les autres. Il y a tant de façons d’être seuls.
Alors, deux solitudes se rencontrent malgré toutes leurs différences. Et chacune va tenter de combler le vide de l’autre.
… il ne se sentait exister qu’auprès d’êtres en demande.
… elle en avait l’intime conviction, cet homme était fiable, lui au moins il ne changerait pas, alors que tous les autres autour d’elle n’en finissait pas de changer (…)
C’est une rencontre pour sauver l’autre. Quand l’un donne et l’autre reçoit. Il est fort, il mesure un mètre quatre-vingt-quinze et pèse cent deux kilos. Il en impose. C’est un pilier sur lequel Aurore peut s’adosser. Il soutient, elle s’abandonne. Un sentiment de déséquilibre maintenu au fil des pages, la sensation d’une fragilité qui pourrait s’avérer destructrice. C’est une histoire d’amour. L’amour comme un îlot au milieu d’un monde qui va trop vite, l’amour comme une solution à nos peurs, comme une fuite.
Un texte dense et puissant, une intensité dans l’écriture que j’ai rarement vécue, qui a traversé mon corps, qui a écrasé ma poitrine d’émotion, j’en ai encore le cœur agité. Une écriture qui ressemble au personnage de Ludovic, rude et pourtant caressante. Je ne voulais pas quitter cette cour, si j’avais pu suivre encore un peu ces personnages, encore quelques pages, parce que je les connais, parce que je les ai connu, je les ai reconnu ici dans ma vie, là dans mon espace, je m’y suis reconnue parfois aussi, parce qu’à un moment donné de notre parcours, on a eu besoin de se reposer sur quelqu’un, parce qu’on a forcément été seul. Parce qu’on a aimé par besoin. Parce que l’amour nous sauve.
Ce livre m’a mis un coup au cœur, un impact qui fait du bien. De ceux qui vous font tant aimer la littérature. Merci M. Joncour.
Flammarion (2016)
427 pages
L’AUTEUR
Comme l'écrit son premier éditeur, Le Dilettante : "Il est né un jour de grève générale. On lui en a longtemps fait le reproche. Depuis, il continue sur sa lancée. Très tôt il est allé à l’école, puis par la suite, il en est sorti. Il a passé son enfance entre Paris, la Nièvre, l'Eure et loir et le Valais suisse. Il a commencé des études de philosophie alors qu’il voulait faire nageur de combat, mais il s'en est sorti autrement, faute de temps."
Il publie son premier roman, Vu, en 1998 au Dilettante qui a obtenu le Prix France Télévisions en 2003. En l'an 2005, il a reçu le Prix de l'Humour Noir Xavier Forneret pour son livre L'Idole.
Il a écrit le scénario du film Elle s'appelait Sarah, d'après le roman éponyme de Tatiana de Rosnay, avec Kristin Scott Thomas, sorti au second semestre 2010 sur les écrans en France, Benelux, Espagne et Australie. Il publie chez Flammarion Que la paix soit avec vous en 2006, Combien de fois je t'aime en 2008, L'homme qui ne savait pas dire non en 2009, L'Amour sans le faire en 2012. En 2012, L'idole est adapté au cinéma par Xavier Giannoli sous le titre Superstar avec Kad Mérad et Cécile de France. Il s'agit de l'histoire d'un homme qui devient célèbre sans savoir pourquoi. Le film, est présenté en compétition officielle à la Mostra de Venise 2012.
L'écrivain national sorti pour la rentrée littéraire 2014 a été finaliste pour le prix Renaudot.