LE SOUCI DES PLAISIRS de Michel Onfray

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En me plongeant dans Le souci des plaisirs, Construction d’une érotique solaire, je pensais voyager vers différentes approches de la sexualité autour du  monde, selon les époques, selon les civilisations. Certes, 254 pages me semblaient un peu juste pour de l’exhaustif mais la balade sans réelle étude approfondie aurait pu m’ouvrir à de nouvelles perceptions. Mais ça n’est pas le choix qu’a fait Michel Onfray puisqu’il a mis en opposition deux approches de l’Éros.

D’un côté, il démontre comment le christianisme a créé une image morbide de la sexualité en Occident. Vingt siècles de christianisme fabriquent un corps déplorable et une sexualité catastrophique. Ce qu’il appelle l’Éros nocturne, défendu et mis en pratique par Sade et Georges Bataille, est cette mise en valeur de la souffrance. Jouir par la douleur, mépris de la femme, dégoût des corps et volupté dans la mort. Le Christ est mort sur la croix dans d’horribles supplices par amour des Hommes. Il faut alors souffrir pour accéder à Dieu. La démonstration m’a semblée convaincante. Issue d’une éducation catholique, baignant dans une culture imprégnée de cette religion mère de l’Occident, il ne m’a pas fallu beaucoup des références d’Onfray pour adhérer à son point de vue.

Par ailleurs, l’auteur va expliquer comment le shivaïsme se trouve à l’extrême opposé, c’est ce qu’il appelle l’Éros solaire. Quand la jouissance est une sensation du divin. Le plaisir est magnifié, recherché, enseigné. L’auteur fait référence au Kama Sutra, non pas comme un mode d’emploi mais comme un apprentissage des corps, comme une éducation au plaisir. Si, là aussi, il y a peu de doutes quant à la crédibilité des conclusions d’Onfray, j’ai trouvé qu’il prenait quelques libertés d’interprétations face aux scènes érotiques observées sur les temples indiens (un sein galbé qui appelle à la caresse et non à l’allaitement… c’est un point de vue qui lui est propre à priori).

Un shivaïte évolue dans l’Un d’un réel homogène ; un chrétien dans le Deux d’une opposition entre le corps et l’âme, la Cité des Homme et le Cité de Dieu. A terme, cette ontologie séparée devient duplicité et facteur de schizophrénie. Pour les premiers, le sexe est affaire de circulation intrinsèque d’énergies ; pour les seconds, une force démoniaque de la Cité des Hommes déchus qu’il faut refuser et récuser afin de pouvoir espérer la vie éternelle et l’immortalité. Religion de la nature et de la vie contre religion du Livre et de la mort.

Le souci des plaisirs est un essai que j’ai trouvé incomplet parce que j’en attendais une vision plus large encore de la sexualité, mais quand bien même j’ai mieux compris comment au fil des siècles une religion peut influer insidieusement sur les rapports humains et la sexualité en particulier.

Flammarion (2008)
254 pages


L’AUTEUR

Né en 1959, Michel Onfray a créé l’Université populaire de Caen où il enseigne la philosophie. Ses livres sont traduits dans plus de 25 pays. Dont Le crépuscule d’une idole.

 

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