LA NEIGE NOIRE de Paul Lynch

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1945. Après avoir passé plusieurs années aux Etats Unis où il a rencontré sa femme Eskra, où est né son fils, Barnabas Kane revient à la source dans le Comté de Donegal, en Irlande. Il installe sa famille dans une ferme et c’est une nouvelle vie qui commence. Jusqu’à ce jour tragique. L’étable brûle. Le bétail brûle. Un homme meurt. Matthew Peoples, un ouvrier qui travaille à la ferme avec Barnabas, reste dans les flammes. Fatalité ? Acte criminel ?
La vie chancelle avec cette odeur de roussi qui persiste, avec ces fragrances écœurantes qui souillent jusqu’au linge de maison, la vie bascule dans ce paysage sauvage, la vie écrase Barnabas et les siens au milieu d’une communauté alors hostile et accusatrice.

Plus tard dans la journée, le soleil s’est dérobé et un ciel de marbre gris a déversé une pluie opiniâtre. Elle a posé ses mouchetures et rebondi sur les pavés, et à travers la cataracte, Eskra a vu du côté des montagnes une traînée de lumière se parer de teintes cuivrées qui ont fait rutiler tout ce qui était sombre et éteint.

De ce texte foncièrement noir émerge une poésie bouleversante. La beauté des images apportée par une écriture puissante nous offre une œuvre dramatique d’une force terrible. Je souligne là le travail incroyable de Marina Boraso, la traductrice, qui a su rendre l’œuvre si juste.
Les dialogues sont intégrés dans le récit, narration, dialogues, pas de coupure, on ne se pose pas (tiens, ça m'évoque quelqu'un...). Cela rend les personnages tellement présents, ils sont si près de nous alors. L’effet est renforcé par la mise en avant de leurs gestes au moment où ils vivent les événements. Imagine un zoom sur une main qui lave du linge ou des genoux ramenés sous le volant d’une voiture (là encore, je pense à cet autre ...). Le même procédé est utilisé pour la description des objets de leur environnement, comme une peinture de maître, le décor fait partie intégrante de l’atmosphère qui règne. Un texte très visuel, on palpe le réel. Et il ne manquait à tout cela que la vision d’une nature sauvage et rude (ici celle de l’Irlande profonde) pour me rappeler l’écriture du grand Cormac McCarthy, qui est moins lyrique néanmoins.

C’est dans une tension qui va grossissant que tu termineras ce livre. Quand tu le refermeras ta poitrine cognera plus fort, tu seras sûrement perturbé voire éprouvé, mais ce qui est certain, c’est que tu seras touché par la plume talentueuse de Paul Lynch.

Albin Michel (2015)
303 pages

 

L’AUTEUR

Originaire du Donegal, Paul Lynch vit aujourd'hui à Dublin. Journaliste et critique de cinéma, il écrit régulièrement dans le Sunday Times, l'Irish Daily Mail et l'Irish Times. Son premier roman, Un Ciel rouge, le matin (Albin Michel 2014), salué unanimement par la presse comme une révélation, a été finaliste en France du Prix du Meilleur Livre étranger.

 

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