L'ARCHIPEL D'UNE AUTRE VIE d'Andreï Makine
1952.
Alors que Staline prépare l’URSS à affronter une troisième guerre mondiale, cinq soldats sont envoyés traquer un fugitif. Nous sommes en Sibérie, dans l’Extrême-Orient russe et ces soldats vont progresser dans la Taïga, bravant une nature féroce et entière, sans concession. Et ce fugitif, ce criminel qui les balade, qui les nargue se faufilant, s’extirpant de cette nature sauvage, qui est-il ?
Pavel Gartsev est un de ces soldats, c’est lui qui raconte cette chasse à l’homme, dévoilant les mesquineries humaines, les conflits d’intérêt, les abus de pouvoir. Cinq hommes qui ont peur. Peur de la délation, peur de la trahison. Des hommes écrasés par un système soviétique menaçant et redoutable avec les ennemis du parti. Peut-on guetter une trace d’humanisme dans cette traque au cœur d’une nature si brutale ? La vie de Pavel Gartsev va basculer lorsqu’il découvrira qui est le traqué…
Ce que je vis, arrivant là-haut, fut impossible à exprimer. L'infini, le néant, la chute dans le vide... Ma pensée articulait ces mots qui s'effaçaient devant la vertigineuse beauté qui n'en avait plus besoin. Une légère brume voilait l'horizon. L'océan unit au ciel était l'unique élément qui nous entourait de toutes parts. Et le soleil, déjà bas, renforçait cette sensation de fusion, recouvrant tout d'un poudroiement doré, ne laissant pas le regard s'accrocher à un détail.
Je découvre Andreï Makine avec ce livre fort. Une écriture qui se veut pourtant caressante, touchante, on se laisse emporter sans réticence dans la Taïga rude parce que l’auteur l’aime, il aime ce pays, il sait nous le faire aimer. Une écriture caressante et pourtant les mots font leur œuvre, ils bousculent les idées, ils forcent à une ouverture des esprits. Ce recul dans la nature désertique permet une observation des Hommes et une réflexion sur leur devenir.
Un livre d’espoir. Peut-être. Où rêve et liberté sont encore des mots que l’on peut s’approprier.
Un livre magnifique.
Leur monde ne me concernait pas, car ce n'était qu’un jeu et je n'étais plus un joueur. Pour jouer, il fallait désirer, haïr, avoir peur. Moi, je n'avais plus ces cartes en main. J'étais libre.
Seuil (2016)
283 pages
L’AUTEUR
Andreï Makine est un écrivain d'origine russe et de langue française. En 2011, il révèle qu'il a publié des romans sous les noms de Gabriel Osmonde et Albert Lemonnier. En 1990, il publie son premier roman, La fille d'un héros de l'Union soviétique. Il obtient la reconnaissance du public et de la critique avec son quatrième roman, Le testament français, paru en 1995, pour lequel on lui décerne les prix Goncourt, Médicis et Goncourt des lycéens. Le 3 mars 2016, il est élu membre de l'Académie française.